Le sourire et la prophétie autoréalisatrice

Montcalm, toi et moi on se croisera plus dans les prochains mois. C’est l’été, on se dégourdira souvent les pieds dans tes parcs. C’est un temps pour te sourire. Il y a quelque chose d’un peu cliché, d’un peu fleur bleue sur ce sourire qu’il faut faire aux gens, et qui est contagieux, et que ci et que ça. Mais là, il faut que je t’avoue, il y a quelque chose de la prophétie autoréalisatrice dans le fait de sourire à ses concitoyens qui me parlent ces temps-ci.

courtoiseJe ne te nommerai pas personne, tu me connais, on se garde quand même une petite gêne, mais l’autre jour en marchant sur Fraser j’ai vu venir quelqu’un qui correspondait au préjugé du « quartier snob ». Quelqu’un qui semblait préoccupé, un peu renfrogné, un peu mauvais-début-de-journée. En le croisant, je me suis permis un sourire et même d’y aller d’un bonjour tout bas, comme ça – sans trop pousser –, j’avais pas trop le temps de m’arrêter pour jaser. Et bien j’ai eu droit à un retour de politesse d’une personne qui m’a semblé tout à coup complètement différente. Ce n’était plus un résident répondant au cliché d’un quartier snob, c’était un citoyen d’un quartier vivant et humain.

Et j’ai pensé à toi à ce moment-là. Je me suis dit que ce que tu es cher quartier, c’est en partie ce qu’on te fait être. C’est là la prophétie autoréalisatrice. Si je me dis que tu es un quartier snob, désabusé, retourné sur lui-même et que je laisse passer ce concitoyen dans la rue en ayant moi-même l’air renfrogné, je rends cette impression réelle. Je réalise la prophétie. Je poursuis mon chemin en me disant qu’il est bien ainsi que je le figurais ce quartier. Pourtant, si je prends le temps de me montrer courtois, l’image que tu me renvoies est tout autre. Tu es ce quartier humain et courtois que je souhaite que tu sois.

Parce qu’après tout, le quartier, sa culture, ce qu’on en retient, c’est souvent le miroir de nos propres perceptions. Ce quartier est beau par la beauté que l’on prend le temps d’y regarder. Ce quartier est vert par les efforts que l’on met pour aménager ses terrains. Et que ce quartier est heureux par l’amabilité que l’on prend le temps d’offrir à ses concitoyens. Eh oui, je sais Montcalm, tu me diras qu’un sourire et un bonjour ne résoudront pas l’ensemble des problèmes, mais c’est de l’action directe – pas besoin de pétitions, de groupes de pression ou d’interpellation au conseil de ville. C’est de l’action directe et l’impact est visible. Et parfois, il me semble que c’est ce dont on a besoin.

Dessin de Marie-Josée Bourgault

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