St-Agapit 1920 : Et si le temps pouvait s’arrêter
Le prochain spectacle présenté à Premier Acte est un mélange de danse et de théâtre. Monmontcalm.com s’est entretenu avec le metteur en scène, Olivier Normand qui nous parle de ses questionnements sur la vieillesse et les souvenirs.
Q : D’où vous est venue l’idée de la pièce St-Agapit 1920?R : L’idée est partie il y a trois ans lorsque ma grand-mère est décédée à 92 ans. Elle avait l’Alzheimer avancé. On cherchait des photos pour l’exposition funéraire et je suis tombée sur une série de photos d’elle à la cabane à sucre où elle doit être dans la vingtaine. En regardant ces photos-là par rapport à ma grand-mère à 92 ans, c’était vraiment vertigineux pour moi d’essayer de comprendre. Je ne pouvais pas dire à la fille de 22 ans sur la photo, c’est déjà fini et où est allé tout ce temps-là. Je me suis demandé comment elle voyait ça dans sa tête, qu’elles étaient ses moments importants, si elle voyait ça par fragment, par morceaux, des détails ou quelque chose de plus général? On a essayé de construire des scènes pour essayer de répondre à ces questions-là. C’est une danseuse qui joue le rôle de ma grand-mère et l’autre danseuse et la comédienne sont ses deux amiesQ : Votre spectacle est à la fois un mélange de danse et de théâtre. Pourquoi avoir choisi cette mise en scène?R : Au début, on s’est posé la question si ça allait être plus de la danse ou du théâtre et au final on se demandait c’était quoi le meilleur moyen pour exprimer l’idée qu’on veut exprimer dans cette scène la. Ça nous a permis de créer un langage qui permettait de bien répondre à ça et ce qu’on avait envie de dire. Il n’y a presque pas de texte parce que parfois je trouve que quand on nomme des choses qui sont fragiles comme les souvenirs, elles n’existent plus. Ça peut devenir banal quand on met un mot dessus. Alors que les choses sont plus complexes pour moi. Parfois, cela peut-être un peu déstabilisant pour le spectateur de voir un mélange de danse et de théâtre, c’est pour ça qu’au début je viens lire une lettre où je donne assez de clés aux spectateurs pour comprendre où on s’en va.Q : Avez-vous peur de vieillir?R : Oui parce que j’aime faire beaucoup de choses. J’aime me lever le matin et aller travailler et je sais que ça va avoir une fin. Le fait de faire un spectacle qui parle de ça est une manière pour moi d’amener un certain calme à ses questions là. J’ai l’impression de ne pas avoir le même regard maintenant que quand je vais avoir 80 ans. Déjà là par rapport à ma vingtaine, j’ai l’impression que les choses vont plus vite. Il y a des choses sur lesquelles il faut que je mette une croix. À 20 ans, tu penses que tu vas pouvoir tout faire, mais à 30 ans, tu te dis ça va vite. Il y a comme des deuils à faire, mais à mon âge j’ai l’impression qu’ils sont difficiles à faire par rapport aux personnes âgées qui ont un recul sur leur vie. Entre 1920 et 2015, il s’est passé énormément de choses au Québec. Si je regarde ma vie et celle de ma grand-mère, ça n’a aucun rapport. Mais les affaires qui marquent au final sont souvent les mêmes pour tout le monde comme la rencontre amoureuse marquante, les enfants.Q : Quels sont vos souvenirs avec votre grand-mère?R : Ma grand-mère avait une maison qui était la maison de famille où j’allais quand j’étais petit et je rêvais une fois par année environ que j’étais dans cette maison-là et que j’allais dans le grenier. Et dans mon rêve, j’entends les gens en bas, mais personne ne se demande où je suis partie. C’est comme si le temps était suspendu et quand je sors au bout de trois ou quatre heures, le temps n’a comme pas avancé. J’ai appelé la compagnie les instants suspendus. Pour moi, au théâtre, c’est l’une des dernières places je trouve où on peut vraiment suspendre le temps.Q : Comment exprimez-vous le temps suspendu dans la pièce?R : On s’est questionné sur ce qui faisait partie du visuel de ma grand-mère, la forêt, la nourriture, une table, des chaises, des pots en verre. Donc on s’est dit, on va faire une scène où dans les pots il y a de la nourriture, des fleurs, etc. Et la scène c’est de marcher sur les pots donc il y a une certaine fragilité. C’est comme quand j’essaye de me rappeler d’un souvenir que je ne veux pas oublier et je voudrais ralentir ce moment-là. Une fois je suis allée rejoindre quelqu’un en Thaïlande que je n’avais pas vu depuis longtemps et quand je suis arrivé à l’aéroport c’était très intense, mais au final ça a duré quatre secondes. Et quand je revois le souvenir dans ma tête, c’est au ralenti pour augmenter le temps et que cela ne disparaisse pas.Q : Quels sont vos coups de cœur du quartier Montcalm?R : J’ai habité pendant trois ans au coin de Bourlamaque et René Levesque et depuis que j’ai déménagé dans Saint-Sauveur, ce qui me manque le plus ce sont les plaines d’Abraham. Je vais chez Morena entre deux répétitions. J’aime Bistro B pour sa carte qui change tous les jours et il y a mon lunetier aux Halles Cartier, La lunetterie Dr René Verret.
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