La danse à deux rôles de Nancy Lavoie | 14 janvier 2020 | Article par Suzie Genest

Crédit photo: Alexis Vigneault

La danse à deux rôles de Nancy Lavoie

Nancy Lavoie pratique et enseigne le tango et la massothérapie. Elle vit à Montcalm et à Montréal, quand elle ne prend pas la route sur les ailes de sa passion.

Cette Abitibienne initiée aux arts dès son enfance se destinait d’abord à une carrière en musique :

« La musique, c’est ce qui m’a aidée à passer l’adolescence, dans mon petit village en Abitibi, loin de tout. Ma mère, elle voulait définitivement faire de moi une artiste. Elle m’a inscrit à des cours de danse, de musique… Dans mon petit patelin, j’étais connue comme celle qui faisait des spectacles. […] J’ai fait de la musique pendant un bon moment, je suis allée jusqu’à faire un baccalauréat, pensant que je pourrais devenir musicienne. Mon instrument principal, c’était le piano. »

Vers la fin de ses études en musique classique, Nancy sentait l’appel d’autres genres musicaux, comme le jazz, mais se trouvait déjà vieille pour un nouveau parcours scolaire. Un jour, ayant la bougeotte après cinq heures de pratique au piano, elle s’est rappelé le plaisir qu’elle avait à danser, plus jeune. Alors inscrite à l’Université de Montréal et libre les lundis soir, elle a repéré des cours de tango argentin offerts dans cette plage horaire et convaincu un ami de l’y accompagner. Bientôt, ils dansaient dans leurs temps libres, dans les corridors, les salles de cours vides. « J’ai fini mon bacc. en musique en dansant », dit Nancy en riant.

Danser, maintenant…

Tout de même déterminée à exercer une carrière de musicienne, Nancy Lavoie a décroché un emploi intéressant à Québec dans une école de musique, mais l’école a dû fermer ses portes. Sans emploi et en manque de tango, elle a décidé d’organiser des cours, faisant venir à Québec ses professeurs, Paul Montpetit et Claudine Blain. Et peu à peu, elle s’est mise aussi à l’enseignement.

Avec son frère, installé à Québec après avoir fait du tango à Paris, Nancy dansait et passait le chapeau entre autres à l’Inox, alors que le bar se trouvait dans le secteur du Vieux-Port. On l’a vue aux Fourberies de Scapin – auxquelles ont succédé les Salons d’Edgar, milonga de Saint-Roch – sur la rue Saint-Vallier Est où elle avait aussi un local de classe, au Studio P et dans différentes salles… En 1995, Nancy a fondé avec Manon Minier Avenue Tango à Montcalm.

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Tango [ tabac. alcool. ecstasy. ]
En plus des cours, Avenue Tango a fait naître projets de troupes et spectacles, à Québec et ailleurs. Dans Tango [ tabac. alcool. ecstasy ], spectacle célébrant les 15 ans de l’école, Nancy faisait un numéro « un peu circassien théâtralisé » en tandem féminin avec Karen Goudreault. Cette prestation a séduit la communauté tango queer un peu partout et ouvert à Nancy les portes d’une carrière internationale en enseignement du tango argentin.

« Quand je suis arrivée à Québec, j’étais toute seule, je n’avais pas de professeur ni partenaire, j’ai appris à faire les deux rôles. La vraie clé de toute ma carrière, ça a été ça : les deux rôles. C’est pour ça que la communauté queer m’a invitée à aller enseigner, même si je ne suis pas queer. […] Ici aussi, même si les gens aiment voir le bel argentin avec la fille en robe […], ce que je présentais passait assez bien. »

Partageant désormais son temps entre Montcalm et son « petit chalet à Montréal, à Rosemont-Petite Patrie », elle enseigne dans les deux villes et ailleurs dans le monde, et fait encore aussi des performances.

« Tango Ecstasy »

Tango Ecstasy…

Posted by Avenue Tango on Thursday, October 6, 2011

La passion d’enseigner, l’art de toucher

« L’enseignement, c’est ma passion », dit Nancy. Si elle est tombée en amour avec le tango, c’est avant tout pour « le plaisir d’être en contact avec quelqu’un, d’improviser […] une danse qu’on crée à deux ». Cette mise en contact avec l’autre est aussi un moteur sur le second versant de sa passion : les massages.

Massothérapeute depuis 2005, Nancy enseigne au centre L’Attitude et travaille également pour la Fondation de la massothérapie. Cette fondation facilite l’accès à des massages pour les personnes vivant avec des douleurs chroniques, un cancer, des problématiques de santé mentale. Nancy travaille plus particulièrement avec des gens atteints de douleurs chroniques.
« Ces personnes-là sont extraordinaires, vraiment, vraiment, résilientes. »

Dans cette vie parallèle, Nancy a développé un concept de retraites en art du toucher, qu’elle organise pour le moment à Baie-Saint-Paul. Le but de ces retraites de trois jours, c’est « d’aller chercher des proches aidants pour qu’ils puissent se reposer, avoir du temps à eux, apprendre à toucher ». Nancy mise sur l’approche Trager, « la plus douce et sensible », qu’elle utilise aussi avec les personnes atteintes de douleurs chroniques. Un peu comme le tango, ces retraites amènent les participants à rencontrer l’autre.

« On touche et on se fait toucher. […] Des fois, c’est un toucher maladroit, mais même à ça, ce n’est pas grave, ça fait du bien. »

Sans trop élaborer, elle évoque le rêve d’un projet en art du toucher, avec des performances artistiques… Telle une chorégraphie de tango, la vie de Nancy Lavoie marie deux univers parallèles résolument connectés.