Fond de rang, asphyxie et grands espaces

Fond de rang nous dépose à Notre-Dame-du-Rosaire, Lac-Saint-Jean. Au milieu de nulle part, un coin aussi perdu que les âmes qui le peuplent, où les espaces ont beau être grands, ils n’en sont pas moins étouffants.

<em>Fond de rang</em>, asphyxie et grands espaces | 15 novembre 2021 | Article par Monmontcalm

Crédit photo: David Mendoza Hélaine

Collaboration spéciale : Pascaline Lamare, Le Bourdon du Faubourg.

Fond de rang nous dépose à Notre-Dame-du-Rosaire, Lac-Saint-Jean. Au milieu de nulle part, un coin aussi perdu que les âmes qui le peuplent, où les espaces ont beau être grands, ils n’en sont pas moins étouffants.

On se retrouve au cœur d’un trio familial, entre Marie qui refuse de quitter la maison laide et délabrée que lui a laissée son père, Jo, son chum qui y demeure avec elle sans jamais vraiment avoir voulu vivre là, et Louise, mère envahissante, omniprésente, indiscrète.

Cet équilibre un peu croche, un peu précaire, vole en éclats lorsque David revient après plusieurs années d’absence. Il débarque sans prévenir, s’installe au milieu de la cellule familiale sans rien demander à personne et s’amuse à dynamiter les faibles liens qui retenaient la mère, la fille et Jo. David est un Survenant, un séducteur, qui arrive de quelque part pour aller on-ne-sait-où, non sans avoir laissé derrière lui un amoncellement de débris et de cendres encore chaudes.

David dans une scène de la pièce Fond de rang
David est un Survenant, un séducteur, qui arrive de quelque part pour aller on-ne-sait-où, non sans avoir laissé derrière lui un amoncellement de débris et de cendres encore chaudes.
Crédit photo: David Mendoza Hélaine

Fond de rang réussit à créer une ambiance poisseuse, oppressante, où évoluent des personnages habilement dépeints dans des corsets sociaux dont ils ne peuvent se défaire seuls. La conception musicale, assurée par Dillon Hatcher et Sarah-Anne Arsenault, donne une dimension tout à fait intéressante et pertinente pour le propos. Si la pièce explore les relations humaines toxiques, et ce qu’il faut parfois pour s’épanouir sur les plans sexuel et relationnel dans un milieu a priori peu propice, il ne faudrait sans doute pas grand-chose de plus dans l’écriture pour maintenir le lancinant malaise et la tension dramatique tout au long de la pièce.

La distribution de Fond de rang est une réussite. Le texte est véritablement porté par les acteurs, qui lui donnent beaucoup de relief et de dimension, y compris dans les confrontations silencieuses. Sylvie Cantin est délicieuse dans son rôle de mère excellant dans le chantage affectif. Samuel Corbeil campe un David incandescent, troublant, irrésistible pyromane et suborneur jouissif. Marie-Ève Lussier-Gariépy, diaphane, fragile, incarne une Marie frêle mais enracinée dans son fond de rang, comme un roseau qui plie mais ne rompt pas. Vincent Nolin-Bouchard, également auteur du texte, interprète un Jo tout en retenue, un peu engoncé, un peu gauche, dont la gêne palpable est très bien servie par la sobriété de ses répliques.

  • Fond de rang est présenté jusqu’au 20 novembre 2021 à Premier Acte.
  • Production : Théâtre pour pas être tout seul
  • Mise en scène : Lucie M. Constantineau
  • Assistance à la mise en scène : Elizabeth Baril-Lessard

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