Un coup de patte peut sauver une vie avec CHASAM

Sauvetage, retour à la vie sociale et aux études : les chiens d’assistance en santé mentale peuvent changer le quotidien d’une personne vivant avec un stress post-traumatique ou un trouble anxieux généralisé. Pas moins de 300 personnes sont déjà en attente d’un chien au Québec. Or l’organisme CHASAM, qui permet ce jumelage, n’est toujours pas reconnu par le gouvernement.

Un coup de patte peut sauver une vie avec CHASAM | 29 décembre 2021 | Article par Viktoria Miojevic

En formation les chiens CHASAM portent un dossard vert au nom de l'organisme.

Crédit photo: Gracieuseté CHASAM

Sauvetage, retour à la vie sociale et aux études : les chiens d’assistance en santé mentale peuvent changer le quotidien d’une personne vivant avec un stress post-traumatique ou un trouble anxieux généralisé. Pas moins de 300 personnes sont déjà en attente d’un chien au Québec. Or l’organisme CHASAM, qui permet ce jumelage, n’est toujours pas reconnu par le gouvernement.

Une coupure au bien-être

Fondé en 2014, CHASAM se trouve dans le Centre Frédéric Back. Sa mission est de contribuer à l’amélioration de la qualité de vie et au mieux-être psychologique des personnes qui bénéficient d’un chien d’assistance en santé mentale.

Moins connus de la population, ces chiens reçoivent une formation de près de 18 mois. Ils peuvent changer la vie des personnes aux prises avec une anxiété généralisée ou un stress post-traumatique.

Il ne s’agit pas de stress ou d’anxiété ponctuels. Ces personnes vivent au quotidien avec un trouble panique ou de l’agoraphobie, par exemple. Ce peut être la conséquence de formes de violences conjugales ou parentales subies par le passé.

« [Ces violences], ça peut créer cette coupure-là dans un état de bien-être. Cette coupure peut provoquer une série d’anxiétés dans la vie quotidienne qui empêche les personnes de retrouver une vie sociale. Ça peut mener à des cas très graves d’isolement social et même de suicide », explique le président de l’organisme, Cyril Frazao.

À tous, un animal de compagnie peut procurer un sentiment de bien-être. La mission du chien d’assistance est tout autre, affirme Cyril Frazao. Par exemple, le chien peut détecter les tremblements aux jambes d’une personne en début de crise. À partir de là, s’il est couché, il peut se lever, lever la patte et signaler une anomalie.

Sur l'image une personne bénéficiaire d'un chien CHASAM, regarde l'eau avec en bas à gauche son chien qui regarde dans la même direction.
Fondé en 2014, CHASAM a mis en place un programme de jumelage pour des chiens d’assistance en santé mentale.
Crédit photo: Gracieuseté CHASAM

Aussi, le chien peut s’assoir sur la personne pour la calmer de son poids. Lors d’une perte de conscience dans un lieu public, le chien peut saisir la main d’une personne pour la mener vers son maître en détresse. En cas d’urgence et en dernier recours, il peut aboyer pour alerter des proches.

En réalité, « un chien d’assistance en santé mentale, c’est très spécifique à l’expérience de la personne et au vécu dans son passé », précise M. Frazao.

Le président de l’organisme rappelle que la personne, pour être éligible au programme, doit avoir reçu un diagnostic posé par un professionnel. Un chien d’assistance, ce n’est pas qu’un soutien émotionnel. Ce n’est pas non plus une excuse dont on se sert pour obtenir le droit aux animaux dans un logement.

La nécessité d’un cadre légal

Depuis le début de la pandémie, CHASAM éprouve de la difficulté à trouver des chiens. Cyril Frazao constate un délai de deux ans pour un seul chien. En cause, la multiplication de l’achat de chiens de compagnie pendant le confinement.

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Une fois choisis, les chiens sont placés en famille d’accueil. Ils sont dressés selon la norme Assistance Dogs International et les techniques de renforcement positif. Dès cette étape, CHASAM envisage le jumelage avec une personne en attente. Malgré ce protocole, le gouvernement ne reconnaît pas l’organisme.

Cette réalité rend CHASAM inéligible aux subventions. Or un chien et son nouveau maître ont besoin de 35 000 $ pour achever le parcours d’adoption. C’est pour cette raison que les maîtres fournissent une contribution d’au moins 5000 $ et sont acteurs des campagnes de sociofinancement. En plus du chien, à travers des ateliers, CHASAM apporte un soutien socio-psychologique aux participant.e.s du programme.

Si CHASAM est présentement en campagne, c’est qu’il n’existe pas vraiment de cadre légal pour les chiens d’assistance en santé mentale.

« On est pris entre deux… Il y a un besoin, mais on n’a pas d’argent. On n’arrive pas à récolter assez d’argent des bailleurs de fonds. Déjà que la santé mentale est le parent pauvre de la santé publique… »

Entraînement du chien, reconnaissance des organismes, jurisprudence en cas de discrimination : rien de cela n’est couvert par la loi au Québec.

Retour à la vie

Avec l’aide des chiens, des personnes ont vu leur vie changer radicalement. Cyril Frazao cite en exemple la fondatrice de l’organisme, qui a eu le premier chien il y a sept ans. Elle a pu reprendre ses études, retrouver une vie sociale et même se spécialiser en psychoéducation.

D’autres « ont repris le goût d’aller au restaurant, qui était une chose impossible auparavant », ajoute-t-il. Une personne dans la vingtaine a aussi repris goût au contact social, car le chien amenait de l’assurance dans les conversations avec autrui.

Derrière le foulard vert que portent les chiens formés par CHASAM persiste des discriminations à l’encontre des bénéficiaires. On en a vu à l’Université Laval dernièrement, on en rencontre dans les restaurants. Contrairement aux chiens-guides pour des personnes malentendantes ou aveugles, les chiens d’assistance en santé mentale sont absents de la loi et des chartes.

« Imaginez une personne qui a des enjeux de santé mentale, qui s’isole et qui a déjà de la misère à sortir de chez elle. Alors d’aller devant les tribunaux…! »

Affiche de campagne CHASAM, en plein air avec un chien assistant
Une campagne de sociofinancement a lieu tout l’hiver.
Crédit photo: Gracieuseté CHASAM

Une campagne de sociofinancement

Au vu du manque de sensibilisation et de cadre législatif, CHASAM a lancé une campagne de financement dont la cible est de 10 000 $. Cet argent permettra d’aller à la rencontre de la population et de convaincre les politicien.ne.s d’engager un travail législatif sur les chiens d’assistance en santé mentale. L’argent servira aussi à créer une table de concertation avec d’autres organismes des milieux de la santé mentale et des chiens d’assistance.

À la fin du printemps, une pétition sera diffusée « pour faire pression sur le gouvernement », indique Cyril Frazao.

La campagne en cours est accessible sur le site web de CHASAM. On peut aussi s’y abonner à l’infolettre et suivre l’organisme sur sa page Facebook.

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