Ailleurs que maintenant: des étoiles plein les yeux

Bienvenue dans la poésie douce-amère d’Ailleurs que maintenant, une pièce qui nous emmène dans un long voyage intérieur, vers un ailleurs qui n’attend que nous.

<em>Ailleurs que maintenant</em>: des étoiles plein les yeux | 4 avril 2022 | Article par Monmontcalm

Crédit photo: Nicola Vachon

Collaboration spéciale : Pascaline Lamare, Bourdon du Faubourg.

Bienvenue dans la poésie douce-amère d’Ailleurs que maintenant, une pièce qui nous emmène dans un long voyage intérieur, vers un ailleurs qui n’attend que nous.

Tout commence alors que Normand fait ses boîtes, prenant soin de trier l’essentiel, l’important et les souvenirs. Sa collection d’objets hétéroclites, fragments d’enfance et autres petits riens qui font pourtant sens dans la vie de chacun, s’organise méthodiquement, sous nos yeux, à l’aube d’un grand voyage.

Autour de Normand gravitent plusieurs personnes, toute liées à divers degrés à lui, toutes marquées par le meurtre crapuleux de Nicolas, frère de Normand. Il y a Cindy, amoureuse en deuil de Nicolas; Steven, le gardien de nuit; Laura, la marraine civique de Normand; Cérick, le truand; Louis-Robert, l’ingénieur qui doit réparer un désastre; et d’autres encore. Tous traversés par des chaos intérieurs. Tous cherchant une échappatoire au quotidien trop dense, trop laid. Normand entoure sa vie de dessins, illustre son quotidien pour l’embellir en deux dimensions.

« Ma vie, faut que je la dessine sinon je fous rien », dit-il.

Il se confectionne une tenue d’astronaute qu’il se fait un devoir de porter au quotidien, « pour l’entraînement », « déguisé pour de vrai », parce que comme les enfants qui rêvent de cosmos, il pourrait bien finir par flotter dans l’espace, si seulement quelqu’un voulait bien croire en lui.

« Ça sent bon l’espace, ça sent l’absence de pression », confie-t-il.

Ailleurs que maintenant traite du deuil et des différentes manières dont on peut passer au travers de la disparition d’un être aimé. Que ce soit en se réinventant dans un alter ego héroïque, en allant au bout d’une vengeance, ou en partant loin, très loin, pour se retrouver en paix avec soi-même.

On alterne entre les moments doux de poésie sous un ciel étoilé et des instants sombres, aussi noir que l’espace infini. L’émotion n’est jamais très loin de la scène, et il est difficile de ne pas s’attacher aux personnages et à leurs tourments intimes.

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Des étoiles sur scène et dans les yeux

La mise en scène allie projections de bande dessinée, de vidéo, sur un décor mouvant de cartons, au rythme d’une musique stellaire interprétée en direct par Stéphane Caron. Mettant en valeur les illustrations du bédéiste Guillaume Demers, le dispositif complète l’information, fait voir les pensées des personnages sous forme de bulles, dit parfois l’indicible, contextualise de manière émouvante ce que vivent les personnages.

Saluons ici un dispositif efficace, que l’on doit à Keven Dubois, pour les éclairages et projections, et à Vanessa Cadrin, pour les décors. Cette hybridation des disciplines artistiques nous offre des moments d’une étonnante sincérité face aux incohérences et à l’écroulement d’un monde.

Éloge de la lenteur

« La pièce prend position contre la violence de notre monde et critique le réflexe d’affrontement qui, trop souvent, nous fait combattre le feu par le feu. Elle interroge la nécessité de s’extraire du quotidien pour se construire tel qu’on se rêve et pose un regard empathique sur les êtres différents, marginalisés et fragilisés, qui peinent à trouver leur place dans la mécanique chaotique contemporaine », dit Jean-François F. Lessard, auteur et metteur en scène.

Il se pourrait que le spectateur trouve que Ailleurs que maintenant a quelques longueurs. Que l’on profite pourtant de ces moments de calme pour se laisser porter par les douces émotions que la pièce instille délicatement. La lenteur ressentie reflète les mouvements lents dans l’espace et nous invite à l’empathie. Pour soi, pour autrui. Les réflexions, tout en sagesse, de Normand, un peu décalées, un peu en diagonale par rapport au quotidien, nous invitent à pondérer nos propres façons de faire.

Le spectacle s’inscrit en continuité avec Matéo et la suite du monde, jouée à Entr’Actes en 2016. On y retrouve Julien Fiset-Fradet, qui campe un Normand délicat, un peu lunaire, un peu ailleurs, déjà parti, sans raison de rester. Mathieu Bérubé-Lemay, donne au rôle de Steven, le gardien qui se rêve en justicier des temps modernes, une belle imperturbabilité. Les quatre autres interprètes, Charles-Étienne Beaulne, Vincent Champoux, Amélie Laprise et Catherine Simard, bien connus du milieu théâtral de Québec, offrent une belle prestation, fragile, émouvante, humaine.

Présentée sous la forme d’une véritable BD théâtrale, une représentation spéciale de Ailleurs que maintenant inaugurera le 35e Festival Québec BD le 6 avril. La représentation sera suivie « d’une discussion sur la marginalité dans les mondes de la bande dessinée et du théâtre, et comment celle-ci est plus largement le reflet de l’enjeu de la diversité dans le monde de l’éducation et dans notre société ».

Ailleurs que maintenant

  • Texte et mise en scène : Jean-François F. Lessard
  • Illustrations BD : Guillaume Demers
  • Musique en direct : Stéphane Caron
  • Costumes : Dominique Giguère
  • Texte écrit en collaboration avec Mathieu Bérubé-Lemay, Frédérique Bradet, Stéphane Caron, Hugues Frenette, Jean-François Plante et Catherine Simard

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