Faire mieux avec moins. Ce principe décrit bien l'Écume. La maison d'édition se distingue par une approche humaine et écologique. L'entreprise localisée dans le quartier Montcalm mise sur sa plus grande valeur, soit le talent des auteurs.
L’Écume, une maison d’édition à la dimension humaine

Le 21 septembre dernier, la maison d’édition l’Écume a lancé le recueil de Loup Gauthier à la librairie-café Saint-Suave. L’entreprise promeut des auteur·ices de la Francophonie avec un angle résolument responsable sur le plan social et environnemental.
Crédit photo: Llamaryon
Faire mieux avec moins. Ce principe décrit bien l’Écume. La maison d’édition se distingue par une approche humaine et écologique. L’entreprise localisée dans le quartier Montcalm mise sur sa plus grande valeur, soit le talent des auteurs.
La poète Laetitia Beaumel a fondé l’Écume en 2020. Au cours des trois dernières années, elle a créé une communauté d’écrivains. Basée au Centre culture et environnement Frédéric Back, son entreprise est l’une des seules maisons d’édition de la province domiciliée à Québec.
L’Écume, un projet né de deux constats
Auteure et travailleuse culturelle, Mme Beaumel a immigré de la France il y a 15 ans. Rapidement, elle a constaté la même réalité que dans son pays d’origine. Ici aussi, le milieu de l’édition se concentre dans les grandes villes, à Montréal, dans le cas du Québec. Cette évidence est d’autant plus vraie en poésie.
« Je trouvais ça dommage que Québec, reconnue comme Ville de littérature UNESCO, avec une scène littéraire très active, ne compte quasiment pas de maisons d’édition en poésie dont le siège social se situe sur son territoire », relate la directrice de l’Écume.
Laetitia Beaumel s’est rendue compte également du manque de considération envers sa profession.
« Sur le prix d’un livre, l’auteur n’obtient que des peanuts. En moyenne, un écrivain reçoit 10 % des ventes. Sans lui, le livre n’existe pas, mais c’est l’intervenant dans la chaîne qui a le moins de redevances si l’on veut, se désole-t-elle. En plus, on demande à l’auteur de venir à des cérémonies et de faire des lectures. Il n’est jamais payé pour ce genre de choses. Tout ça, c’est bénévole. Comme si écrire n’est pas un métier et ne mérite pas de recevoir salaire. »
Une responsabilité sociale à assumer
La directrice littéraire de l’Écume est consciente que les choses ne changeront pas du jour au lendemain. L’industrie du livre est un « écosystème » en soi, reconnaît Mme Beaumel. Néanmoins, son entreprise lui permet de poser des actions pour valoriser le travail des écrivains.
« Je voulais apporter ma contribution. J’ai donc proposé aux auteurs de leur verser 20 %, ce qui représente le double de ce qu’on donne traditionnellement dans le milieu, indique-t-elle. Mais ça impliquait de court-circuiter d’autres acteurs comme le distributeur qui mange en général de 24 à 30 % de la part du gâteau. »
Tout au long du processus, l’Écume accorde beaucoup de place aux auteurs.
« On les implique dans le choix de la couverture du livre, du titre et plus largement dans la réflexion éditoriale. Pour nous, c’est une responsabilité sociale avant tout », résume Laetitia Beaumel.
Des pratiques écologiques
En outre, l’Écume favorise une distribution « écologique ». L’entreprise compte sur l’engagement de cyclistes bénévoles et l’apport du covoiturage, entre autres choses.
« Tout ça demande à revoir un paradigme. Notre volonté reste d’offrir un service toujours super efficace, mentionne Mme Beaumel. L’idée, c’est de faire de la slow édition, de l’édition plus lente, avec les moyens du bord. Ce n’est pas moins professionnel pour autant. Ça veut surtout dire de revoir nos attentes en terme de délais de livraison dans les librairies, par exemple.»
Contrairement à d’autres maisons d’édition, l’Écume ne délocalise pas son impression. Le recours à un imprimeur québécois lui coûte plus cher inévitablement.
« C’est une femme qui nous imprime avec des encres végétales uniquement. On n’utilise pas de métaux lourds. On préconise plutôt des papiers postconsommation 100 % recyclés. On porte une attention particulière aux détails, souligne Laetitia Beaudel. De plus, les couvertures, ce ne sont pas des photos libres de droits qu’on prend sur internet, comme le font certaines maisons d’édition. On paye un cachet pour un artiste québécois, ajoute-t-elle. Ça ne veut pas dire qu’on est irréprochables ou qu’on est les seuls à faire ces choses. Mais on s’efforce d’avoir une réflexion globale sur tous les aspects de l’entreprise. Je pense qu’on se démarque peut-être pour cette raison. »
L’Écume en quête d’un agrément professionnel
Les Éditions de l’Écume compte actuellement quatre titres au catalogue. Deux de ces livres sont partis en réimpression.
Dernièrement, l’entreprise a lancé une campagne de sociofinancement. L’argent amassé servira à couvrir les frais de ses quatre prochaines parutions prévues pour le 31 décembre. Ainsi, l’Écume atteindra le minimum de publications requises pour devenir admissible à l’agrément d’éditeur professionnel. Ce « sésame » lui ouvrirait les portes des subventions du secteur de l’édition et permettrait de pérenniser ses activités.
« Les auteurs nous soumettent des manuscrits via notre site Internet ou par courriel. Notre comité de lecture fait ensuite une première sélection. Puis, nous procédons à une sélection finale. L’auteur ne paie jamais pour être publié. Si on retient son livre, on assume tous les frais. Du graphisme, à la révision linguistique, jusqu’à la commercialisation, en passant par l’impression. Au Québec, un livre de littérature, en poésie, n’est pas rentable. On ne peut pas couvrir nos frais juste avec les ventes. C’est pour ça qu’il est important d’aller chercher un agrément professionnel », conclut Laetitia Beaudel.