Ici vécut : H. P. Lovecraft, au 801, avenue de Bougainville

On retrouve sur différents immeubles de Québec 135 plaques Ici vécut. Elles rappellent à nos mémoires des personnes qui ont marqué à leur façon l’histoire de la ville. Howard Phillips (H. P.) Lovecraft (1890-1937), auteur américain de littérature fantastique, a déjà séjourné dans le quartier Montcalm.

<em>Ici vécut</em> : H. P. Lovecraft, au 801, avenue de Bougainville | 8 juillet 2023 | Article par Simon Bélanger

L'écrivain américain H. P. Lovecraft a déjà séjourné dans cette résidence de l'avenue de Bougainville.

Crédit photo: Simon Bélanger

On retrouve sur différents immeubles de Québec 135 plaques Ici vécut. Elles rappellent à nos mémoires des personnes qui ont marqué à leur façon l’histoire de la ville. Howard Phillips (H. P.) Lovecraft (1890-1937), auteur américain de littérature fantastique, a déjà séjourné dans le quartier Montcalm.

Les journées orageuses qui s’annoncent dans les prochains jours donnent une occasion idéale pour se plonger dans des bouquins. Et même si c’est l’été, ce n’est pas obligatoire de sélectionner des lectures plus légères.

Les personnes les plus courageuses peuvent par exemple s’immerger dans l’univers de l’écrivain H. P. Lovecraft, qui nous a notamment laissé L’appel de Ctulhu.

Mais saviez-vous que l’écrivain américain a séjourné à Québec à trois reprises durant les années 1930?

H.P. Lovecraft avait alors laissé un récit de voyage, qui s’additionnait d’une histoire de la Nouvelle-France. Ces textes didactiques, bien loin du style horrifique habituel de Lovecraft, a été publiée de façon posthume en 1976. L’ouvrage porte le titre To Quebec and the Stars.

Enfance agitée

Howard Phillips Lovecraft est né le 20 août 1890, à Providence, dans le Rhode Island. Alors qu’il avait à peine trois ans, son père est traité pour démence et termine ses jours à l’hôpital en 1898.

H.P. Lovecraft est élevé par sa mère, ses deux tantes et son grand-père maternel. Bourré de talents, le jeune Lovecraft récite des poèmes dès l’âge de trois ans et rédige les siens à six ans. Son grand-père l’encourage dans la lecture et lui fait même découvrir des histoires gothiques.

En revanche, Lovecraft n’entre à l’école qu’à l’âge de huit ans et en est retiré l’année suivante. Il est fréquemment malade et n’hésite pas à confronter l’autorité. Il entre quand même au lycée à l’âge de 12 ans.

L’écrivain aurait aussi souffert de terreurs nocturnes, ce qui aurait pu influencer ses travaux futurs.

Publicité

Premiers écrits et vie d’ermite

Son grand-père meurt en 1904, ce qui affecte particulièrement le jeune Lovecraft, qui pense même à s’enlever la vie.

La même année, il débute la rédaction de son premier conte, La Bête dans la caverne, qu’il termine en 1905.

Entre 1908 et 1913, l’auteur se lance principalement dans la poésie. Il vit en ermite et ne garde le contact qu’avec sa mère.

Il est éventuellement repéré par Edward F. Daas, président de la United Amateur Press Association (UAPA). Lovecraft gravit les échelons de l’association et en devient le président en 1917.

La même année, il rédige des œuvres de fiction, dont Dagon, qui sera publiée professionnellement en 1919 dans The Vagrant, puis en 1923 dans Weird Tales. Le magazine Weird Tales publiera d’ailleurs une grande partie des travaux de Lovecraft.

Décès de la mère, mariage et déménagements

La mère d’H. P. Lovecraft rend l’âme en 1921, à la suite de complications chirurgicales. Elle se trouvait à l’hôpital depuis deux ans, où elle était traitée pour une dépression.

Après la mort de sa mère, Lovecraft rencontre Sonia Greene, une commerçante d’origine juive et ukrainienne avec qui il se marie en 1924. Il emménage avec elle à New York, mais les difficultés financières du couple les obligent à quitter la mégalopole. Sa femme doit déménager à Cleveland pour trouver du travail.

En 1926, Lovecraft et Sonia Greene se séparent officiellement et l’écrivain retourne vivre à Providence.

H.P. Lovecraft, dans une version colorisée
Crédit photo: Wikimedia Commons

Production horrifique et prolifique

C’est dans une maison de style victorien qu’il rédige les œuvres les plus importantes de sa carrière. Il s’agissait surtout de nouvelles et de courts romans.

H. P. Lovecraft est surtout associé à l’horreur et au fantastique. Plusieurs créateurs, comme Stephen King ou Neil Gaiman, se sont ouvertement inspirés de son héritage.

Des critiques estiment que sa production s’est déclinée en trois grands cycles : les histoires macabres (1905-1920), le cycle onirique (1920-1927) et le Mythe de Ctulhu (1927-1935).

Dans la culture populaire, on lui doit la création du Necronomicon, régulièrement cité dans les films, les chansons ou les jeux vidéo. Cet ouvrage fictif, tiré de l’univers de Lovecraft, est aussi appelé le Livre des Morts.

Plusieurs thèmes se retrouvent dans l’œuvre de Lovecraft, comme la culpabilité héritée, l’impossibilité d’échapper à son destin ou la société menacée. Il s’est aussi intéressé aux êtres d’origine extraterrestre, bien présents dans le Mythe de Ctulhu.

Racisme

De nombreux critiques ont souligné que les pensées racistes de l’écrivain américain étaient perceptibles à travers sa création.

Pour Michel Houellebecq, auteur français et biographe de Lovecraft, le racisme se trouve au cœur des récits de l’écrivain de Providence.

« C’est la haine raciale qui provoque chez Lovecraft cet état de transe poétique où il se dépasse lui-même dans le battement rythmique et fou des phrases maudites ; c’est elle qui illumine ses derniers grands textes d’un éclat hideux et cataclysmique », écrit Houellebecqu.

De nombreux passages discriminatoires envers les populations juives, autochtones ou afro-américaines se trouvent dans les écrits de Lovecraft.

Décès dans la pauvreté

Malgré son nom très connu aujourd’hui, H. P. Lovecraft n’a jamais réellement connu le succès financier de son vivant. À la fin de sa vie, il doit même quitter sa maison pour vivre dans un logement avec une de ses tantes.

En 1936, il reçoit un diagnostic de cancer de l’intestin. H. P. Lovecraft meurt le 15 mars 1937, à 46 ans.

Il aura quand même eu l’occasion de voyager, en se rendant à Québec à trois reprises. Il a logé dans une résidence de l’avenue de Bougainville, bâtie en 1909.

Sur la plaque rappelant son passage, on peut lire que Lovecraft « a écrit un texte remarquable sur Québec évoquant notamment son « parfum de douce antiquité, de quiétude et d’éternité ».

Ce passage à Québec a aussi inspiré Christian Quesnel et Ariane Gélinas, dont la bande dessinée La Cité oblique place la ville au centre de l’univers lovecraftien. Celle-ci est publiée aux Éditions Alto.

Une bière de la microbrasserie La Barberie a même été produite en son honneur en 2022.

Une section du site de la Ville de Québec rassemble la liste des plaques Ici vécut.

La Cité Oblique, bande dessinée de Christian Quesnel et Ariane Gélinas, qui repose une relecture lovecraftienne de l’histoire de la Nouvelle-France.
Crédit photo: Page Facebook Éditions Alto

Sources

Britannica, H. P. Lovecraft

Michel Houellebecq, H. P. Lovecraft – Contre le monde, contre la vie, Éditions du Rocher, 1991

The H. P. Lovecraft Archive

Ville de Québec, Fiche d’un bâtiment patrimonial – 801, avenue de Bougainville

Lire aussi:

Ici vécut : Jean Marchand, au 135, rue Aberdeen

Pour en savoir plus ...

Soutenez votre média

hearts

Contribuez à notre développement à titre d'abonné.e et obtenez des privilèges.

hearts
Soutenir