Ici vécut: Maurice Blackburn, au 424, rue des Franciscains

On retrouve sur différents immeubles de Québec 135 plaques Ici vécut. Elles rappellent à nos mémoires des personnes qui ont marqué l'histoire de la ville. La musique composée par Maurice Blackburn (1914-1988) a accompagné un grand nombre de films de l'Office national du film du Canada.

<em>Ici vécut</em>: Maurice Blackburn, au 424, rue des Franciscains | 23 septembre 2023 | Article par Simon Bélanger

Maurice Blackburn, compositeur de musique pour l'ONF, a notamment vécu dans ce triplex de la rue des Franciscains, bâti en 1930 dans le quartier Montcalm.

Crédit photo: Simon Bélanger - Monmontcalm

On retrouve sur différents immeubles de Québec 135 plaques Ici vécut. Elles rappellent à nos mémoires des personnes qui ont marqué l’histoire de la ville. La musique composée par Maurice Blackburn (1914-1988) a accompagné un grand nombre de films de l’Office national du film du Canada.

Dimanche dernier se concluait la 12e édition du Festival de cinéma de la ville de Québec. Si on s’intéresse bien souvent aux membres de la distribution ou aux personnes derrière la caméra, on revient moins souvent sur celui, essentiel, de compositeur de films.

Maurice Blackburn, originaire de Québec, a été particulièrement prolifique dans ce domaine, signant la musique de 414 films entre 1941 et 1985. Sa collaboration avec le réalisateur Norman McLaren fut particulièrement féconde.

De Québec à Boston

Maurice Blackburn est né le 22 mai 1914, dans le Faubourg Saint-Roch. Son père est un représentant de commerce de descendance écossaise.

Dès l’âge de 10 ans, le jeune Maurice suit des cours de piano avec Mère Saint-Pierre. Il poursuit ensuite son apprentissage en compagnie de Mlle Bolduc, ainsi que l’organiste de l’église Saint-Roch, Claude Turgeon.

En 1937, Maurice Blackburn fait son entrée à l’université Laval, où il étudie la musique. Ses professeurs sont alors Jean-Marie Beaudet (composition), Joseph-Arthur Bernier (orgue et piano), Henri Gagnon (orgue) et Robert Talbot (théorie). De plus, il suit quelques cours à Montréal en compagnie de Léo-Pol Morin, Claude Champagne et Georges-Émile Tanguay.

En 1938, Maurice Blackburn remporte un prix Jean-Lallemand, qui le récompense pour son oeuvre pour orchestre Les Petites Rues du Vieux-Québec.

L’année suivante, une bourse du gouvernement du Québec lui permet d’étudier à Paris. Toutefois, la guerre qui se déclenche en Europe le conduit plutôt au New England Conservatory de Boston. Il bénéficie alors des enseignements de Quincy Porter (composition et contrepoint) et de Francis Findlay (orchestration et direction). Blackburn assiste également aux conférences d’Igor Stravinsky à l’université Harvard.

En 1939, il compose aussi une Sonatine pour piano, en plus de Fantaisie en mocassins, qu’il dirigera à la tête de l’Orchestre symphonique de Québec.

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En 1941, il revient de Boston et commence à travailler en télévision.

Maurice Blackburn.
Crédit photo: Fonds La Presse, Bibliothèque et Archives nationales du Québec

De Radio-Canada à l’ONF

À son retour au nord de la frontière, Maurice Blackburn est engagé par Radio-Canada pour travailler sur quelques émissions. Il accompagne aussi l’ethnologue Marius Barbeau dans sa cueillette de chansons sur l’île d’Orléans.

Barbeau apprend à son collègue qu’un réalisateur de l’Office national du film (ONF) prépare un documentaire sur le temps des sucres au Québec. Maurice Blackburn est engagé. Il travaille sur de la musique folklorique qui accompagne Maple Sugar Time (Le temps des sucres), de Stanley Hawes .

Maurice Blackburn est ensuite engagé officiellement par l’ONF, où il devient l’un des rares compositeurs spécialisés en musique de film. Il travaille sur une trentaine de documentaires dans les années 1940.

L’année 1943 marque également son mariage avec l’écrivaine et scénariste Marthe Morisset, elle aussi honorée par la Ville de Québec par une plaque Ici vécut, qui semble avoir été effacée.

Maurice Blackburn (centre) est entouré de sa femme Marthe Morisset-Blackburn et du réalisateur tchèque Bratislav Pojar.
Crédit photo: Fonds La Presse, Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Collaboration féconde avec Norman McLaren

Au cours de sa carrière, Maurice Blackburn sera un fidèle du réalisateur Norman McLaren, surtout spécialiste du cinéma d’animation. En 1947, les deux hommes travaillent une première fois ensemble, alors que le Québécois compose la musique de La poulette grise.

Leurs collaborations les plus connues se retrouvent dans les courts métrages A Phantasy (1952), Blinkity Blank (1955), Le merle (1958), Lignes verticales (1960), Pas de deux (1967) et Narcisse (1983).

Du documentaire à la fiction, en passant par la réalisation

Maurice Blackburn ne produit pas seulement de la musique pour des films documentaires. Il est aussi derrière la trame sonore de nombreux films de fiction de l’ONF.

Il n’y a qu’à penser à Les mains nettes (Claude Jutra, 1958), La canne à pêche (Fernand Dansereau, 1959) ou à Mourir à tue-tête (Anne Claire Poirier, 1979).

Maurice Blackburn ne se contente pas de la musique. En 1969, il se lance lui-même dans la réalisation, avec le court métrage Ciné-crime. Il utilise alors l’écran d’épingles d’Alexeieff. Il s’agit d’un «écran vertical blanc perforé de centaines de milliers de trous, chacun traversés par une épingle rétractable». Cet outil permet de projeter des ombres de longueurs variables et de créer plusieurs types de dégradés.

Figure majeure du cinéma

Maurice Blackburn a joué un important rôle dans l’histoire du cinéma canadien. Il s’est d’ailleurs mérité le prix Albert-Tessier en 1983, une récompense habituellement remise à des réalisateurs.

Il avait d’ailleurs offert sa vision du cinéma en recevant cette récompense.

«C’est peut-être parce que je conçois le cinéma comme un opéra qu’il m’est difficile de penser aux images, aux bruits, au commentaire, à la musique, comme si ces éléments pouvaient être compartimentés, isolés les uns des autres.»

Maurice Blackburn rend l’âme le 29 mars 1988, à l’Hôtel-Dieu de Montréal.

En 2014, l’ONF a souligné, par l’organisation d’une multitude d’activités, le centenaire du compositeur de Québec. Il est considéré comme «l’un des plus importants compositeurs de musique de film du Québec et du Canada».

Sa fille, Esther Rochon (née Blackburn), a poursuivi dans les pas artistiques de ses parents, en se lançant très jeune dans l’écriture. Elle a notamment écrit des romans de science-fiction.

En 2017, Louise Cloutier, biographe de Maurice Blackburn, a fait don des archives de sa collection à Bibliothèque et Archives nationales du Québec. Celles-ci complétaient le fonds d’archives amorcé par Esther Rochon.

Maurice Blackburn conserve aujourd’hui son statut de compositeur agréé du Centre de musique canadienne.

Tous les titres de films présents dans l’article peuvent être cliqués. Tous ces liens mènent vers les films, disponibles gratuitement sur le site de l’ONF.

Une section du site de la Ville de Québec rassemble la liste des plaques Ici vécut.

Sources:

Allaire, Denis et Louise Cloutier, «Blackburn, Maurice», L’Encyclopédie canadienne, 2014.

Cinémathèque québécoise, «Les biographies – Maurice Blackburn».

Cloutier, Louise, «Célébrons le centenaire de Maurice Blackburn. Compositeur à la scène et à l’image», communiqué Ciné-Campus, 2014

Cloutier, Louise, «L’œuvre de Maurice Blackburn confiée au patrimoine musical», Le Nouvelliste, Carrefour des lecteurs, 2 octobre 2017.

Cloutier, Louise, «Maurice Blackburn», Société de musique contemporaine du Québec (tiré du livret du disque Filmusique-Filmopéra.

Hellegouarch, Solenn, «La pensée de Maurice Blackburn, compositeur de l’ONF», [creationsonore.ca], 2011, 68 p.

Jean, Marcel, «Maurice Blackburn, lauréat», texte de présentation du prix Albert-Tessier, 1983.

Office national du film, «L’ONF célèbre l’écran d’épingles».

Ville de Québec, «Fiche d’un bâtiment patrimonial – 420 à 428, rue des Franciscains», Répertoire du patrimoine bâti.

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