Le major Samuel Holland, un homme d’exception

Collaboration spéciale: Rénald Marchand

Le major Samuel Holland, un homme d’exception | 22 juillet 2023 | Article par Monmontcalm

Renald Marchand demeure dans le complexe Samuel-Holland. Son intérêt pour le personnage qui a donné son nom à l’immeuble et au parc voisin, l’a mené vers un entretien avec Suzanne Vermette, une autre résidente passionnée d’histoire.

Crédit photo: Wikimedia Commons

Collaboration spéciale: Rénald Marchand

Rénald Marchand demeure au Samuel-Holland, dans le quartier Saint-Sacrement. Il s’intéresse grandement à l’histoire des lieux qui l’entourent. Il réalise ici un entretien avec une autre résidente, pour en apprendre davantage sur le personnage qu’était Samuel Holland.

Je demeure au Samuel-Holland depuis deux ans. j’étais curieux de connaître l’histoire de cet homme dont on retrouve le nom à plusieurs endroits. J’ai rencontré une résidente du Samuel, Mme Suzanne Vermette. Cette passionnée d’histoire a effectué des recherches et des lectures sur cet homme d’exception. 

Mme Suzanne Vermette habite au Samuel-Holland depuis près de 40 ans. Toujours intéressée par l’histoire, elle fouilla dans le Dictionnaire biographique du Canada pour mieux connaître le Major Samuel Holland, qui a donné son nom au complexe immobilier où elle réside. Originaire de Victoriaville, elle a aussi été la première trésorière de Baie-Comeau.
Crédit photo: Courtoisie Renald Marchand

Origines et formation

Comme je savais qu’il était anglophone, j’ai posé la question s’il portait son vrai nom ou plutôt le surnom de son pays ?  Je sais qu’il était anglophone, mais portait-il son vrai nom ou le surnom de son pays?

Mme Vermette : Effectivement, la confusion peut être facile, car on a souvent confondu Pays-Bas et Hollande. Le Dictionnaire biographique du Canada indique que « Johannes Samuel Holland » est né à Nimègue, aux Pays-Bas, en 1728. Il a combattu dans l’artillerie hollandaise en 1745.

Comme il se trouvait à l’étroit dans l’armée hollandaise, il rejoignit l’armée britannique en 1754 afin d’obtenir de l’avancement. Il avait laissé son épouse à Nimègue. Il fut promu lieutenant rapidement.

Une question se pose : quelle compétence avait-il pour croire autant en lui ?  

Mme Vermette : Il semble avoir eu une formation d’exception comme ingénieur militaire, arpenteur et hydrographe. C’était un homme très « professionnel », comme on dit aujourd’hui, car les principaux chefs militaires le découvrent et retiennent rapidement ses services.

C’est le cas du comte de Loudoun, colonel en chef du régiment des Royal Americans en mars 1756. Celui-ci amène Samuel Holland aux États-Unis, où il travailla à cartographier divers territoires avec ses équipes : la frontière de l’État de New York, les alentours du Fort Carillon pour préparer une attaque. Mais rapidement, on le muta au Canada.

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Conquête britannique

Ah oui, pourquoi ? Les colonies américaines étaient très importantes pour l’Angleterre ? 

Mme Vermette :  1758, 1759, c’était la période préparatoire pour l’attaque de 1759 sur Québec. Louisbourg, au Cap-Breton, était un obstacle important pour l’armée anglaise. Holland se trouvait sous les ordres du général James Wolfe. Celui-ci appréciait au plus haut point son travail méticuleux, très souvent sous le feu de l’ennemi.

Après la reddition de Louisbourg, Holland suivit le général Wolfe pour baliser et cartographier les alentours de Québec. Ses compétences d’hydrologue pour hydrographier le fleuve représentaient une carte gagnante dans les mains de Wolfe. Elles pavèrent la voie vers la victoire à Québec.

Voilà pourquoi on le connaît chez nous! Mais après la bataille ? 

Mme Vermette : Après la victoire des Anglais et la mort de Wolfe, il cartographie les colonies autour de Québec et la vallée du Saint-Laurent. Son génie militaire, reconnu par ses supérieurs, l’amena à tracer les plans d’une nouvelle citadelle pour défendre Québec.

Mais notre homme avait la bougeotte. En 1762, il se rendit à Londres rencontrer les membres du Board of Trade pour faire les relevés de toutes les possessions britanniques en Amérique du Nord!

Cartographie du territoire

Cela semble immense comme tâche. Comment faisait-il? 

Mme Vermette : C’est quand même surprenant l’immensité des territoires qu’il a parcourus. Certes, il était maintenant doté de bonnes équipes qu’il avait formées, il utilisa les nouvelles technologies, les relevés astronomiques, la lunette d’approche et l’horloge astronomique.

Je me permets de dresser une courte liste de ses lieux de travail : New York, New Jersey, Île du Cap-Breton, Île Saint-Jean (devenue l’Île-du-Prince-Édouard), les Îles-de-la-Madeleine, la Gaspésie, etc.

Samuel Holland
Crédit photo: Wikimedia Commons

Entretemps, le gouverneur Murray lui confia le poste d’arpenteur général de la province de Québec et du district nord de l’Amérique du Nord. Il fut choisi pour siéger sur le premier Conseil de Québec et fut nommé juge de paix par le gouverneur. Je suis essoufflée juste à relater ses nombreux voyages.

Domaine Holland et famille

Cet homme ne devait pas avoir de vie personnelle. Toujours parti, toujours au travail ? 

Mme Vermette : (rires) Tenez-vous bien! C’est à cette époque qu’il obtient les droits de propriété du domaine Holland. Il s’agit d’un rectangle délimité sur les côtés par les prolongements des rues Marguerite-Bourgeoys et Turnbull et, pour les extrémités, par le fleuve Saint-Laurent et la rivière Saint-Charles.

Samuel Holland y fait construire une splendide maison, appelée Holland House. Il se met en couple vers 1762 avec Marie-Joseph Rollet, âgée de 21 ans. Samuel Holland avait alors 35 ans. Il la mariera plus tard, après la séparation avec sa première épouse, Gertrude Hasse.

Il ne perdit pas de temps! Un premier fils,  John Frederick, naîtra rapidement.

Il semble que ses passages à Québec soient marqués par une activité nocturne intense, ce qui lui fit écrire au général Haldimand :

« Vous devez savoir mon général que j’ai poussé la chose un peu trop loin avec ma petite compagne de lit, car j’aurai une belle petite fille comme cadeau de Noël ».

Le major Holland eut 10 enfants avec Marie Rollet, celle qu’il appelait sa « petite femme ».

[Le domaine] était une immense propriété champêtre avec champs, troupeaux et beaucoup de dépendances. Lorsqu’Holland était à Québec, il menait une vie mondaine remarquée. Les meubles et décorations intérieures étaient du plus grand apparat.

James Pattison Cockburn a fait de nombreuses représentations de sites particuliers de Québec. Cette représentation de la maison et du domaine Holland fut exécutée autour de 1827.
Crédit photo: Wikimedia Commons

Autres possessions

La maison, déjà grande au départ, fut agrandie plusieurs fois, pour garder la réputation de haut standard qu’il avait. Cependant, il y demeurait seulement en saut de puce, en raison de ses nombreux voyages et, surtout, à cause de son intérêt pour l’Île Saint-Jean.

Il avait des possessions sur l’île, qu’il agrandit considérablement, notamment à la suite d’un marché conclu avec le gouverneur Murray pour le fief Saint-Jean.

De plus, il se rendit également du côté ouest du pays, particulièrement à Kingston, dans la péninsule du Niagara et au lac Ontario. Sa santé déclinait et il confia à son adjoint Collins de plus en plus de tâches. Il subit une attaque de paralysie en 1790, limitant ses activités physiques.

Déclin et décès

Oh, oh, cela commence à sentir la fin ? 

Mme Vermette : Effectivement, son influence se réduisit dans la ville de Québec. Il fut retiré du conseil législatif. Samuel Holland regardait aussi pour de nouvelles concessions ailleurs, dont près de la rivière Saint-François.

Or, la maladie prenait de plus en plus le dessus sur le major. Celui-ci mourut le 28 décembre 1801.

On lui fit des funérailles grandioses et il fut enterré dans sa propriété, tout près de son fils. Il ne s’y trouve plus aujourd’hui. En effet, lors des travaux de construction des édifices actuels, on a retrouvé des ossements que l’on croyait appartenir à de militaires. C’étaient plutôt ceux du major et de son fils. Maintenant, ceux-ci pourraient être enterrés à l’Hôpital-Général de Québec.

Impressions

Que retenez-vous de la vie du Major Samuel Holland ?  

Mme Vermette : C’était un homme d’exception, compétent et bon. L’influence qu’il a eue à cette époque sur la science et les façons de faire a été considérable. D’abord l’intelligence et la science, la politique et la politicaillerie après.

Son héritage est immense : tous ses travaux disséminés aux quatre coins de l’Amérique du Nord, 17 atlas, 100 volumes touchant la géographie, l’histoire moderne, les sujets militaires et navals, 32 gravures originales, 60 peintures à l’huile, dont plusieurs étaient de lui.

Il laissa à la ville de Québec un immense territoire, avec des dispositions écologiques avant l’heure. Le parc Holland est un héritage formidable. La Ville de Québec a dressé un petit monument et une plaque commémorative lui rendant un hommage juste et bien senti. J’ai toujours apprécié ce geste de notre ville et j’en suis hautement reconnaissante.

Merci, madame Suzanne Vermette, pour votre témoignage. On se retrouve bientôt pour celui sur Ernest Gagnon ? 

Bien sûr!

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