On retrouve, sur différents immeubles de la ville de Québec, 142 plaques Ici vécut. Elles rappellent à nos mémoires des personnes qui ont marqué l'histoire de la ville. Anne Hébert (1916-2000), célèbre écrivaine derrière Kamouraska et Les Fous de Bassan, a grandi dans le quartier Montcalm, où elle a vécu longtemps avec sa famille, avant de quitter pour la France.
Ici vécut : Anne Hébert, au 1075, avenue du Parc
On retrouve, sur différents immeubles de la ville de Québec, 142 plaques Ici vécut. Elles rappellent à nos mémoires des personnes qui ont marqué l’histoire de la ville. Anne Hébert (1916-2000), célèbre écrivaine derrière Kamouraska et Les Fous de Bassan, a grandi dans le quartier Montcalm, où elle a vécu longtemps avec sa famille, avant de quitter pour la France.
Le 26 mars prochain, nous connaîtrons les lauréats et lauréates du Prix littéraire 2024 de la Ville de Québec. Du 10 au 14 avril se tiendra aussi le Salon international du livre de Québec, en même temps que le Festival Québec BD.
Tous ces événements nous rappellent que Québec est bien une ville de littérature. Plusieurs auteurs et autrices de renom ont d’ailleurs vécu en ses murs : Philippe Aubert de Gaspé, Adrienne Choquette, Alain Grandbois, Jean-Charles Harvey, Claire Martin, Gabrielle Roy, etc.
Comme elle a donné son nom à une école primaire du quartier, le nom d’Anne Hébert résonne particulièrement dans le secteur de Montcalm.
Mais qui était cette célèbre écrivaine, la deuxième Canadienne à remporter le prix Femina après Gabrielle Roy?
Naissance à Sainte-Catherine
Anne Hébert voit le jour à Sainte-Catherine-de-Fossambault (aujourd’hui Sainte-Catherine-de-la-Jacques-Cartier) le 1er août 1916. Elle descend de nombreuses personnalités importantes dans l’histoire. Son arrière-grand-père Étienne-Pascal Taché fut notamment premier ministre du Canada-Uni et est l’un des Pères de la Confédération canadienne.
Quant à son grand-père Eugène-Étienne Taché, il est l’architecte derrière l’Hôtel du Parlement du Québec.
De son côté, Maurice Hébert, père d’Anne, était fonctionnaire et écrivain. Il a notamment été secrétaire dans le cabinet du ministre libéral Antonin Galipeault. Il a aussi assumé la direction générale du tourisme et de la publicité, en plus de donner des cours au Collège Jésus-Marie de Sillery. L’homme écrit également de la poésie et des pièces de théâtre, de même que des critiques dans Le Canada français et L’événement. Il épouse Marguerité Taché le 22 octobre 1915.
La santé de Maurice Hébert est particulièrement chancelante, alors qu’il apprend en 1919 être atteint d’une tuberculose chronique. La mère d’Anne, Marguerite, vivra également des ennuis de santé, notamment des rhumatismes lorsqu’elle sera âgée dans la quarantaine. Anne Hébert perd aussi son jeune frère Claude, alors qu’il meurt âgé d’à peine six mois.
Départ pour Québec
La famille Hébert, formée des deux parents et de la jeune Anne, quittent Sainte-Catherine pour la ville de Québec alors que l’enfant est âgée de 3 ans. Les Hébert s’installent dans le quartier Montcalm, d’abord au coin de l’avenue Bourlamaque et de la rue Saunders. Puis, en 1924, alors qu’elle a 8 ans, la famille déménage dans un nouveau logis de la rue des Franciscains.
Anne Hébert la qualifie de «petite maison insalubre où l’eau s’infiltrait sur les murs». Puis, en 1934, la famille, qui s’agrandit, déménage finalement au 1075, avenue du Parc. Ce domicile, construit en 1903 par Staveley & Staveley, est d’abord connu sous le nom de Terrasse Sharpe. Anne Hébert grandit avec deux frères et une sœur.
Jeunesse dans les livres, vie de recluse et débuts littéraires
Anne Hébert grandit dans une famille où la littérature est particulièrement importante. En plus de son père, qui l’encourage à lire, son cousin et poète Hector de Saint-Denys Garneau influence également ses lectures. Son décès prématuré à l’âge de 31 ans marquera d’ailleurs fortement Anne Hébert.
L’éducation d’Anne Hébert, tout comme celle de ses frères et sa sœur, se fait d’abord à la maison, auprès des parents ou d’institutrices privées, jusqu’à l’âge de 11 ans. Elle étudie ensuite au collège Notre-Dame de Bellevue, puis au Collège Mérici.
Comme pour ses parents, la santé d’Anne Hébert a longtemps été fragile. Durant l’enfance, elle aurait eu la rougeole, la scarlatine, la coqueluche, de même que plusieurs bronchites et une appendicite aigue.
Plus tard, en 1939, Anne Hébert reçoit, comme son père, un diagnostic de tuberculose (mauvais diagnostic dans son cas). Son médecin lui prescrit donc du repos et un isolement complet.
Anne Hébert vit donc de façon recluse dans la maison familiale de l’avenue du Parc pendant cinq ans. Elle en profite au moins pour lire beaucoup, en plus d’écrire.
En 1942, Anne Hébert publie son premier recueil de poèmes, intitulé Les Songes en équilibre. Cette œuvre lui mérite le prix David. Elle récidive en 1950, avec un premier recueil de nouvelles, Le Torrent. La première nouvelle du recueil a été adaptée au cinéma en 2012 par Simon Lavoie, dans le film Le Torrent. En 1953, l’écrivaine lance Le Tombeau des rois, un deuxième recueil de poésie.
À la même époque, elle commençait à se faire connaître par les différentes institutions. C’est ainsi que la radio de Radio-Canada lui commande la rédaction de textes. En 1953, l’Office national du film (ONF) fait à son tour appel à Anne Hébert pour ses services de rédactrice et scénariste.
Vie parisienne et consécration littéraire
En 1954, Anne Hébert séjourne pour une première fois à Paris, en France. Une bourse lui permettait alors d’y rester un an. Elle tombe finalement en amour avec la Ville lumière. Elle partage d’abord son temps entre Montréal et Paris. Puis, en 1967, après le décès de sa mère, elle s’installe définitivement en France, où elle demeure pendant 32 ans.
C’est d’ailleurs pendant cette période qu’elle amorcera une production prolifique, qui débute avec un premier roman, Les Chambres de bois, en 1958.
Par contre, c’est vraiment en 1970 qu’Anne Hébert connaît la consécration avec son second roman, l’incontournable Kamouraska. Ce livre revient sur un fait divers, l’assassinat d’Achille Taché, le seigneur de Kamouraska, à l’âge de 26 ans.
Cet ouvrage, publié aux Éditions du Seuil, se mérite le Prix des Libraires de France. Trois ans après sa sortie, il est adapté au cinéma par Claude Jutra, dans un scénario auquel collabore Anne Hébert.
En 1975, son troisième roman, Les Enfants du Sabbat, vaut à l’écrivaine le prix Roland de Jouvenel de l’Académie française. Trois ans plus tard, devant les succès connus par Anne Hébert, le premier ministre René Lévesque lui aurait proposé le poste de lieutenant-gouverneure du Québec, qu’elle refuse.
Les Fous de Bassan
Puis, l’année 1982 marque la publication d’une autre œuvre phare de la production d’Anne Hébert : Les Fous de Bassan. Le livre se penche sur la disparition de deux cousines dans un village de la Gaspésie en 1936. Il vaut à Anne Hébert le prix Femina, faisant d’elle la deuxième Canadienne à se mériter ce prix, après Gabrielle Roy. Tout comme pour Kamouraska, ce roman fait l’objet d’une adaptation cinématographique, cette fois sous la direction d’Yves Simoneau, en 1987.
D’autres romans et recueils de poésie suivent dans les années suivantes : Le Premier Jardin (1988), L’Enfant chargé de songes (1992), Aurélien, Clara, Mademoiselle et le Lieutenant anglais (1995) et Poèmes pour la main gauche (1997).
Honneurs
Au cours de sa vie, Anne Hébert a reçu une multitude de prix. En plus de ceux déjà cités, mentionnons le prix Duvernay (1958), le prix France-Canada (1958), le prix de la province de Québec (1959, 1961, 1967 et 1971), le prix Molson (1976), le prix des Libraires (1976), le prix de l’Académie royale de Belgique (1976), le prix du Gouverneur général (1992) et le prix Gilles-Corbeil (1993). En 1960, elle est également élue membre de la Société royale du Canada.
Elle reçoit également des doctorats honorifiques de cinq universités canadiennes : Université de Toronto, Université de Guelph, Université du Québec à Montréal, Université McGill et Université Laval.
Ses problèmes de santé et son âge plus avancé l’obligent à finir sa vie au Québec. Anne Hébert rend l’âme à Montréal le 22 janvier 2000, à l’âge de 83 ans.
Postérité
À l’Université de Sherbrooke, le Centre Anne-Hébert conserve près de 6000 documents relatifs à l’écrivaine, dont l’intégralité de ses œuvres. Le fonds d’archives Anne Hébert est quant à lui conservé par Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ), à Montréal.
Le nom d’Anne Hébert demeure présent dans la toponymie québécoise, un peu partout sur le territoire. À Québec, en plus de l’école primaire dans Montcalm, une avenue Anne-Hébert se trouve dans le quartier Duberger – Les Saules, dans un secteur où les rues portent des noms d’écrivains et écrivaines.
D’autres rues portent le nom de l’écrivaine dans plusieurs municipalités québécoises, dont Montréal, Mirabel, Blainville, Roberval, Rimouski, Lévis et Sherbrooke.
À Sainte-Catherine-de-la-Jacques-Cartier, lieu de naissance d’Anne Hébert, on trouve aussi une rue à son nom, ainsi qu’une bibliothèque et un Centre socioculturel.
Plusieurs de ses œuvres ont traité de thèmes comme la violence, les tourments de l’âme, l’étouffement et la volonté de libération. Plusieurs de ses personnages féminins incarnent d’ailleurs ce désir de se libérer d’un certain carcan.
Anne Hébert aura marqué durablement l’histoire de la littérature québécoise. En 2019, Marie-Andrée Lamontagne lui a consacré une imposante biographie de plus de 500 pages, illustrant ainsi la trace indélébile laissée par l’écrivaine dans le paysage culturel du Québec.
Sources
BEAUCHAMP, Jacques, «Anne Hébert, l’auteure secrète à la vie intérieure riche», Aujourd’hui l’histoire, Radio-Canada OHdio [balado], 31 octobre 2019, 23 min.
Commission de toponymie du Québec, «Anne Hébert».
H. LEMIEUX, Pierre, «Anne Hébert», L’Encyclopédie canadienne, 28 avril 2008.
LAMONTAGNE, Marie-Andrée, Anne Hébert, vivre pour écrire, Boréal, Montréal, 2019, 558 p.
M. HAYNE, David, «Garneau, Hector de Saint-Denys», L’Encyclopédie canadienne, 10 février 2008.
Ville de Québec, «Anne-Hébert», Toponymie.
Ville de Québec, «Hébert, Anne», Répertoire du patrimoine bâti.
Ville de Québec, «Terrasse Sharpe», Répertoire du patrimoine bâti.
Lire aussi :
Ici vécut : Gabrielle Roy, au 135, Grande Allée Ouest
On retrouve, sur différents immeubles de Québec, 142 plaques Ici vécut. Elles r[...]
Ici vécut : Alain Grandbois, au 949, avenue Casot
On retrouve, sur différents immeubles de Québec, 142 plaques Ici vécut. Elles [...]
Ici vécut : Georgina Lefaivre, au 318, rue Fraser
On retrouve, sur différents immeubles de Québec, 142 plaques Ici vécut. Elles[...]
Soutenez votre média
Contribuez à notre développement à titre d'abonné.e et obtenez des privilèges.