Première création du collectif multidisciplinaire Dites-le pas à ma mère, présentée à Premier Acte, Interdit de flâner pose un regard à la fois critique et bienveillant sur l’adolescence et le difficile passage à l’âge adulte lorsque les jeunes cherchent à affirmer leur identité et leur indépendance par tous les moyens qui se trouvent à leur disposition.
Interdit de flâner : une première production réussie
Première création du collectif multidisciplinaire Dites-le pas à ma mère, présentée à Premier Acte, Interdit de flâner pose un regard à la fois critique et bienveillant sur l’adolescence et le difficile passage à l’âge adulte lorsque les jeunes cherchent à affirmer leur identité et leur indépendance par tous les moyens qui se trouvent à leur disposition.
Le cas d’Étienne, qui atteint son zénith en flirtant avec des trafiquants d’herbe tapis dans les tréfonds de leur tanière — quelques années avant la légalisation de la marijuana —, est celui privilégié par l’auteur et interprète de la pièce, Antoine Paré-Poirier. Comme il le décrit si pertinemment : « Si tu veux que toutes les jeunes se garrochent sur de quoi, t’as juste à l’interdire. » Étienne devient donc le revendeur de pot de son école secondaire, non pas par dépendance au weed, mais pour l’assouvissement de son ego et par asservissement au pouvoir, au risque, à la popularité.
Un spectacle éclectique
La voie qu’emprunte Paré-Poirier pour traiter son sujet est celle d’une narration pavée d’ironie. Celle que privilégie Melissa Bouchard à la mise en scène consiste à donner vie au monologue de l’auteur en utilisant tous les éléments sonores et visuels qui permettent de recréer un univers grotesque, inquiétant et sarcastique tant par la musique et les images que par la présence sur scène des concepteurs qui s’intègrent allègrement au jeu.
Pascal Larose-Piché à la conception sonore, Joé Côté-Rancourt à la conception visuelle et Simon Rollin à la direction technique et à la régie, évoluent au même rythme que le principal protagoniste de la pièce, multipliant, en mode réel et virtuel, les individus rencontrés au hasard des pérégrinations d’Antoine. Entre les ami·e·s, les client·e·s, les gorilles, les quidams, sans oublier les petits animaux, les personnages défilent autant sur grand écran ou sous forme de marionnettes qu’en chair et en os. Et le divan terriblement élimé qui trône au centre du décor est utilisé à toutes les sauces pour transporter le public dans différents lieux.
Des repères pour tous les goûts
Ce qui teinte spécifiquement la production, ce sont les nombreuses références télévisuelles et cinématographiques intégrées à l’histoire et qui lui confèrent une dimension ludique et familière. Le ton résonne d’emblée au moment de l’entrée du public alors qu’un cartoon défile à l’arrière-plan pendant que les concepteurs s’assoient sur le sofa pour jaser en attendant le début du spectacle. Plus on avance dans le récit et plus ces références deviennent menaçantes. On passe notamment de la série d’animation Minus et Cortex et du film culte Le Parrain aux jeux télévisés Génies en herbe et Le Cercle, tandis que les questions posées par le présentateur virent au cauchemar.
Mais une des trouvailles les plus savoureuses du collectif consiste à avoir dépeint le pusher d’Antoine, chef de gang et dealer notoire, sous les traits du Grinch, créature fictive inventée en 1957 par Theodor Seuss Geisel et qui a fait l’objet de plusieurs adaptations cinématographiques. Le Grinch figure une sorte d’ogre aux poils verts qui déteste tout le monde et dont le sourire s’étire jusqu’aux oreilles. Larose-Piché lui prête sa voix qui, par la magie du synthétiseur, se transforme en sons caverneux et intimidants, ce qui met la confiance d’Antoine à rude épreuve, comme en témoignent les pulsations de son cœur qui scandent la scène de la première rencontre.
Malgré de petites lacunes sur le plan vidéographique, entre autres lorsqu’Antoine est filmé dans le feu de l’action, cette pièce de théâtre multidisciplinaire trouve son public, à en croire les réactions enjouées dans la salle le soir de la première et les généreux applaudissements de la fin. Une première production réussie pour ce jeune collectif.
La pièce Interdit de flâner est présentée au théâtre Premier Acte jusqu’au 30 novembre 2024. Les billets sont en vente à cette adresse : https://premieracte.ca/spectacles/interdit-de-flaner/
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